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QUI SUIS-JE?....

Franck Laguilliez – L’intime en lumière

 

Il entre en photographie comme on entre en relation : sans bruit, mais avec toute la tension du sensible. Très jeune, il explore les visages comme on effleure un mystère, apprivoise la lumière, cherche ce qui palpite sous la surface. Ce n’est ni un choix ni une vocation. Plutôt une nécessité. Celle de capter ce qui fuit, de retenir l’instant où quelque chose s’ouvre — une faille, un frisson, une vérité furtive.

Ses premières influences lui parlent de peau et de mise en scène : Bettina Rheims, Jean-Baptiste Mondino. Mais très vite, il s’écarte des modèles pour affûter son propre regard. Celui qui ne s’attarde ni sur l’effet ni sur la pose, mais sur l’élan intérieur. Il photographie avec l’âme tendue, dans une écoute presque organique de l’autre. Ce qu’il cherche, c’est la justesse d’un abandon. Ce moment fragile où le masque tombe sans qu’on le pousse. Où le modèle cesse de poser et commence à exister.

Le noir et blanc est souvent son refuge : non par esthétisme, mais par exigence. Une manière d’évider l’image pour en extraire la matière vive. Ses cadrages sont tendus, ses lumières instinctives, ses silences pleins. Chaque photographie est un souffle retenu, un dialogue muet entre l’apparence et ce qui la déborde. Il ne capture pas : il recueille. Il ne montre pas : il révèle.

Portraits d’artistes ou d’anonymes, paysages intimes, scènes urbaines : chez lui, tout est question de rencontre. Avec un lieu, un visage, une émotion. Son appareil devient confident, témoin discret d’un instant suspendu. Il cherche l’invisible, ce qui vibre sous les gestes, ce qui tremble derrière les regards.

En 2011, il publie Raconte-moi ton lit (Éditions Verlhac), un livre singulier, murmuré, comme une série de confidences d’artistes, entre nuit et lumière. Puis, le silence. Une parenthèse de dix ans, où l’image persiste en lui sans volonté de paraître. Il photographie encore, pour lui, parfois. Juste pour le plaisir, dit-il, presque gêné.

Mais en 2025, il revient. À pas feutrés, sans stratégie, sans bruit. Juste avec l’envie intacte. Celle de regarder autrement. De retrouver le fil sensible entre soi et l’autre. Il travaille à un second ouvrage. Le titre reste secret… pour le moment ! Ce qu’il en dira, ce sont ses images.

Car chez Franck Laguilliez, la photographie est un art du lien. Une respiration. Un regard offert, qui sait s’effacer pour mieux révéler. Une trace sensible. Un fragment d’humanité.

 

Carole Schmitz-Chiaroni

 

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